Google vs Médias : Quand l’Info Devient un Fardeau Financier pour le Géant du Web

Une étude récente commandée par Google relance le débat houleux entre les géants du numérique et les éditeurs de presse. D’un côté, un moteur de recherche tentant de prouver que le journalisme ne lui rapporte rien. De l’autre, des médias qui peinent à faire reconnaître la valeur de leur travail. Ce bras de fer soulève des questions profondes sur l’avenir de l’information en ligne.

person using smartphone and laptop at the same time

Une “expérience” pour le moins controversée

Google ne fait jamais les choses à moitié. Pour démontrer que l’information journalistique ne pèse pas lourd dans sa balance financière, le géant américain a mené une “expérience publique” plutôt discrète.

Entre janvier et mars 2024, il a supprimé les contenus d’actualité de ses résultats de recherche pour environ 1 % de ses utilisateurs — répartis dans huit pays européens, mais sans la France ni l’Allemagne. Étrange ? Pas tant que ça.

Les résultats ? Une baisse de seulement 0,8 % des revenus publicitaires. Pas de quoi faire trembler la firme de Mountain View. Selon elle, cela prouve noir sur blanc que les contenus d’actualité n’ont quasiment aucun impact sur son business. Et donc, que payer les médias pour leur présence dans les résultats… serait une aberration.

Mais pourquoi exclure la France et l’Allemagne ?

Deux absentes de taille dans cette expérimentation : la France et l’Allemagne, qui représentent pourtant à elles seules 43 % du marché publicitaire européen. Leur absence fausse-t-elle les résultats ? Disons-le franchement : oui, probablement.

En France, cette exclusion est loin d’être une simple coïncidence. Le tribunal de commerce de Paris a explicitement interdit à Google de lancer l’expérience dans l’Hexagone, à la suite d’une plainte du SEPM (Syndicat des éditeurs de la presse magazine). Le message est clair : on ne joue pas avec les règles du jeu en douce.

Une guerre de longue haleine autour des droits voisins

Si l’ambiance est tendue, c’est que ce conflit dure depuis des années. Depuis la directive européenne de 2019 sur les droits voisins, Google est obligé de rémunérer les éditeurs pour les extraits d’articles affichés dans ses résultats. Un tournant. Un précédent. Et surtout, un coût.

À ce jour, l’entreprise a déjà écopé de deux amendes retentissantes en France : 500 millions d’euros en 2021, suivis de 250 millions en 2022. Rien que ça. Un total de 750 millions d’euros pour non-respect de ses engagements.

Alors, forcément, Google cherche des moyens de démontrer que tout cela ne vaut pas le prix qu’on lui fait payer.

Et maintenant ? L’IA change encore la donne

Comme si cela ne suffisait pas, un autre bouleversement s’invite dans le débat : l’essor fulgurant de l’intelligence artificielle générative. ChatGPT, Gemini, et consorts redéfinissent déjà nos usages. Pourquoi cliquer sur dix liens quand un chatbot peut résumer l’info pour nous ?

Google l’a bien compris. En mars 2025, il a lancé Gemini 2, son moteur de réponses boosté à l’IA. Il est capable de synthétiser les contenus issus de plusieurs sources… sans même que l’utilisateur ait besoin de visiter le site d’origine.

Résultat ? Moins de trafic pour les éditeurs, encore moins de visibilité… et toujours pas de rémunération équitable.

Les médias étranglés par l’évolution du web

Selon Axios, les 500 plus grands sites d’information américains ont vu leur trafic en provenance des moteurs de recherche chuter de 15 % en seulement neuf mois. Une hémorragie numérique. Une perte sèche. Et un modèle économique qui menace de s’effondrer, un clic à la fois.

Et que fait Google ? Il garde la main sur le robinet. Certains diront qu’il utilise sa position dominante pour forcer la main aux éditeurs. D’autres iront plus loin : il prend le bras entier après avoir tendu la main.

Le journalisme semble à la merci d’un système qu’il ne maîtrise plus vraiment.

La valeur de l’information reste un champ de bataille

Ce que révèle cette étude, ce n’est pas seulement la volonté de Google de minimiser le rôle de la presse dans son écosystème. C’est aussi — et surtout — l’ampleur d’un déséquilibre structurel.

Les médias, garants d’une information de qualité, sont coincés dans un modèle où leur travail est de plus en plus invisibilisé, et rarement récompensé à sa juste valeur.

Peut-on imaginer un futur où l’info sera produite sans soutien économique ? Où les rédactions survivront grâce aux miettes de l’algorithme ? C’est peu probable.

Il est temps de remettre la valeur de l’information au centre du débat. Pas seulement en chiffres, mais en principes. En démocratie. En accès libre à une info fiable. Et ça, aucune IA ne peut le résumer à notre place.

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